samedi 30 décembre 2017

La 6, vue de l'intérieur (5)


Même quand y a de la couleur, les Parisiens font la gueule. Moi je prends la 6 tous les matins et quand la rame sort du tunnel, puis s'élance sur le pont de Bercy, je kiff jeter un petit coup d'oeil par la fenêtre en direction de la Seine. Les jours où il fait beau, tu te dis qu'y a pire comme ville où habiter... A 18 ans, j'avais écrit ce poème sur la 6. Gardé dans un tiroir... C'était y a 20 piges...













Sur la Six 

Installé dans son Trône, le métro gronde

rame bondée, ça part dans la seconde 

Portes qui claquent, strapontins qui tapent

Pneus qui crissent, mécanique qui glisse   

La marche mortelle du métro moderne

Petit périple jusqu'à Picpus, casse pipe souterrain

Coup de balais dans ce clair obscur

Il prend le Bel Air, bille en tête

Pour pas se faire dégommer du côté de Dugommier

De retour dans les profondeurs et les odeurs

le doux grincement des rails du douze

berceuse du Pont de Bercy

sur le quai de la Gare, on quitte la Seine

marécageuse aux bras immenses

la fuite vers les chemins de fer du treize élevé s'amorce

pas très à l'aise, comme un cheval raide, il enjambe les boulevards

Suite place d'It, où il crépite

pour reprendre son envol, le corps bizarre

vers des destinations glacières

Un froid d'enfer le plonge sous les rochereaux

Ambiance macabre, il piétine les os du vieux quatorze

Aspiré par les rails, rencontre suspecte à Raspail

Irrespirables senteurs de sépultures

chaleur étouffante, paranoïa montparnassienne

folie des grandeurs, passe-temps des années septante

A Pasteur toujours en piste

le métro du haut de ses arches de métal, féroces et animales

avale courbes et pentes raides, se cambre on ne sait comment

contourne les piquets jusqu'à La Motte

il se fait dupé à Dupleix,

un saxo pour oublier le passé

dans le noir présent après Passi, tour de passe passe

de troc à des rôdeurs planqués derrière le sac à main des grands-mères

A Kleber, même pas un clebs ou un clodo

que des soit-disants éclairés cloitrés dans leur huit clos

Tissant sa toile dans le ciel du tunnel sans étoile

entre quatre morceaux de taule

dernier systole dans ce système solaire





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